Lire entre les secondes

(© Sébastien Lavallée, 2009)

(© Sébastien Lavallée, 2009)

«Une attoseconde est, par rapport à une seconde, ce qu’une seconde est par rapport à l’âge de l’univers.» Cela semble difficile à concevoir, imaginez maintenant devoir analyser des phénomènes guère plus longs que cette durée. C’est sur quoi se penchent des chercheurs de  l’Institut Steacie des sciences moléculaires (ISSM) au cœur du Conseil national de recherches du Canada (CNRC).

Julien Bertrand, un jeune étudiant au doctorat à l’Université d’Ottawa, m’accueille et m’escorte jusqu’aux laboratoires. Tout est tranquille pour le moment, les tubes fluorescents allumés ne permettent pas d’avoir un bon aperçu du laser utilisé pour les expériences : «Il n’y a pas de danger, fais seulement attention de ne pas regarder en direction des caissons orange au fond et de ne pas te pencher au niveau du laser », me suggère mon interlocuteur.

Visite des locaux avec Julien Bertrand (© Sébastien Lavallée, 2009)

Visite des locaux avec Julien Bertrand (© Sébastien Lavallée, 2009)

Vient le moment des explications. Crayon-feutre à la main, devant un tableau blanc, on m’explique comment la pulsation du laser, d’une durée de 30 femtosecondes (unité 1000 fois moins rapide qu’une attoseconde) permet l’ionisation de l’électron qui se détache ainsi de la molécule pour ensuite faire une «recollision». Chargé d’énergie cinétique, il émet donc celle-ci en revenant à son point de départ. Ce procédé permettant de créer une image de l’orbitale des molécules.

Beaucoup de renseignements : je tente de saisir cette version vulgarisée d’un phénomène plutôt abstrait, mais tout aussi intéressant. C’est d’ailleurs ce qui semble charmer les chercheurs présents sur place : étudier un phénomène aussi naturel, mais impossible à voir à l’œil nu.

(© Sébastien Lavallée, 2009)

(© Sébastien Lavallée, 2009)

Je continue ma visite. Dans le fond de la deuxième pièce, je regarde un court vidéo sur un ordinateur portant sur une autre machine. Un étudiant allemand me gratifie de son plus bel accent, mais je comprends tout même le fonctionnement de la bête qu’il s’affaire à faire fonctionner dans un son de pompe puissant.

Après cet arrêt, nous revenons sur nos pas : «Voici l’installation qui m’a convaincu de venir faire mon doctorat ici!», me lance M. Bertrand. Il s’agit d’une suite de miroirs et autre élément optique qui, une fois bien alignés et installé aux bons endroits, permettent au laser de pénétrer dans une chambre et d’altérer la rotation des molécules.

Ensuite, on me tend une paire de lunette et l’on éteint les lumières. Je peux voir les faisceaux rouge et vert qui passe par plusieurs instruments. Cela permet, me dit-on, de contrôler la puissance du laser afin d’atteindre celle nécessaire pour les expériences. Et quelle puissance : bien positionné à un endroit clé, celui-ci peut brûler une feuille de papier : « Nous pouvons atteindre 30 milli joules, soit une longueur d’onde de 30 femtosecondes.» Je vois aussi le résultat, puisque le phénomène comme tel ne peut être observé : une image montrant l’orbitale de l’azote qu’ils ont réussi à obtenir.

(© Sébastien Lavallée, 2009)

(© Sébastien Lavallée, 2009)

Dernière étape, on me présente les futurs locaux nouvellement rénovés : «C’était le laboratoire de Gerherd Herzberg récipiendaire du Nobel de chimie en 1971. Nous avons isolé le plancher des vibrations du bâtiment afin de faciliter les calibrations.» On sent la fierté du jeune chercheur de continuer son travail en ces lieux, comme s’il renouait avec l’histoire.

(© Sébastien Lavallée, 2009)

(© Sébastien Lavallée, 2009)

(© Sébastien Lavallée, 2009)

(© Sébastien Lavallée, 2009)

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